Le constat de commentaires et diffamation sur les réseaux sociaux

Le web et notamment les réseaux sociaux sont devenus un lieu où toute personne peut s’exprimer sans contrôle, sans limite. Il est désormais possible d’insulter et de dénigrer publiquement, de manière facile, en quelques clics. Nous intervenons donc régulièrement afin de faire supprimer sur ces réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, Linkedin, Instagram ou autre toutes publications constitutives d’une diffamation.

Qu’est-ce que la diffamation ?

La définition de la diffamation au sens général est prévue par les textes légaux. En effet l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse définit la diffamation comme « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ».

Qu’est-ce que la diffamation sur internet ou sur les réseaux sociaux ?

Internet a consacré la montée en puissance de réseaux sociaux, devenus pour certains de véritables médias sociaux, permettant aux internautes et aux professionnels de créer une page profil et de partager des informations, photos et vidéos avec leur réseaux.
A titre d’exemple, les principaux réseaux sociaux sont : Facebook, Twitter, Linkedin, Instagram, Snapchat, Copains d’avant etc …
La définition mentionnée plus haut par la loi sur la liberté de la presse est applicable à la diffamation sur les réseaux sociaux.

Quelle forme peut prendre la diffamation sur les réseaux sociaux ?

La diffamation peut prendre plusieurs formes et peut être déguisée, insinuée ou dubitative. Elle est également reconnue si une personne non expressément nommée est identifiable. La diffamation apparait alors comme une limite à la liberté d’expression prévue par l’article premier de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication au public par voie électronique. L’exercice de cette liberté est limité par le respect de la dignité de la personne humaine.

Faut-il que le commentaire ou la publication soit public ?

La question se pose fréquemment dans la cadre des sites tels que Facebook, tweeter et autres. Les propos tenus sur les réseaux sociaux ne sont pas nécessairement publics, le caractère public va dépendre du paramétrage du compte choisi par l’internaute. Aussi, il y a diverses situations dans lesquelles les victimes sont confrontées à des propos diffamants sur un réseau social et souhaitent agir contre les auteurs de ces propos. Cependant le caractère public ou non des propos est à prendre en compte.
Le caractère public du propos diffamatoire ne pose aucune difficulté lorsqu’il est publié sur internet, à la télévision ou dans la presse, la difficulté réside dans la publication dudit propos sur un réseau social.
Dans un arrêt du 10 avril 2013 la Chambre sociale de la Cour de cassation admet le principe que les réseaux sociaux peuvent être le support de diffamation, tout en définissant le caractère public.
Dans les faits, une salariée avait publié des propos diffamatoires sur Facebook accessibles à ses amis. La Cour de cassation précise que l’élément de publicité est constitué « dès lors que les destinataires des propos incriminés quel que soit leur nombre, ne forment pas entre eux une communauté d’intérêt ».
Selon elle, la communauté d’intérêt est « un groupe de personnes liées par une appartenance commune, des aspirations et objectifs partagés ».

Dans un autre cas, une personne a engagé une action en indemnisation contre une autre pour diffamation publique sur Facebook. La Cour d’appel de Dijon dans son arrêt du 27 février 2018 juge que les propos n’ont pas de caractère fautif, elle relève que les textes n’étaient accessibles qu’à un nombre restreint de membres choisis qui « compte tenu du mode de sélection, par affinités amicales ou sociales, forment une communauté d’intérêt ». De ce fait le caractère public est écarté.
Par conséquent, les propos tenus sur Facebook sont d'ordre privé à la condition que « les termes employés ne soient accessibles qu'à des personnes agréées (amis) par le titulaire du compte et fort peu nombreuses ».
Cette condition reste très floue et il restera à la Haute Juridiction d'en préciser les contours. Aussi de ces jurisprudences, il faut en déduire qu’elle prend en compte pour apprécier le caractère public ou non plusieurs éléments :

  • L’existence d’une communauté d’intérêt.

  • Le nombre de personnes potentiellement destinataires.

Cependant, même s’ils ne sont pas considérés comme publics, les textes, écrits ou messages restent fautifs et sont susceptibles d’engager la responsabilité de leur auteur dès lors qu’un dommage a été causé à la victime.

Que dois-je faire si je suis victime de diffamation sur les réseaux sociaux ?

La première chose est de constituer et rassembler toutes les preuves de la diffamation. En effet l’article 9 du code de procédure civile énonce qu’il « incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ».
Il est donc fortement recommandé de faire dresser un constat d’Huissier immédiatement des propos et publications des commentaires diffamatoires.

Le constat d’Huissier sur Facebook, Twitter, Linkedin, Instagram et autre sont devenus courants du fait du sentiment d’impunité qui règne lorsque le support d’information est un réseau social. Pourtant, le constat d’Huissier associé à une procédure ciblée permet systématiquement d’obtenir le retrait des propos litigieux et éventuellement des dommages et intérêts.

Quels sont les recours en cas de diffamation sur internet ou sur les réseaux sociaux ?

Le but est de retirer la publication et de faire condamner l’auteur. Si la diffamation a été prononcée sur un site internet, la victime doit poursuivre d’abord l’auteur des propos et non l’hébergeur du site.
Lorsque le constat d’huissier a été dressé, il sera nécessaire pour la victime personne physique ou personne morale, d’assigner la personne qui s’est rendue coupable de diffamation en justice pour obtenir réparation du préjudice subi. Attention, personnellement, je préconise avant toute procédure, une démarche amiable.
En effet, un courrier d’Huissier ou d’avocat avec copie du constat suffit très souvent à faire entendre raison à la personne auteur de la diffamation. Cette dernière ne serait pas très avisée de continuer dans sa démarche. Si tel n’était pas le cas, il conviendra d’assigner devant le juge.

La diffamation peut être jugée tant sur le plan civil avec l’article 29 de la loi de juillet 1881, que sur le plan pénal avec l’article R.621-1 qui dispose que « la diffamation non publique envers une personne est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la 1ère classe».

Je ne vais pas ici vous exposer les différentes procédures possibles mais uniquement celle que je préconise.

Au pénal :

Il conviendra donc d’agir par voie de citation directe. Hormis le cas où l’identité de la personne coupable de diffamation n’est pas connue, je ne suis pas pour la plainte auprès des services de gendarmerie car expose l’action à un risque de prescription, compte tenu des délais de traitement de ce canal.

Au civil :

Il convient d’assigner en référé pour gagner du temps, et également l’action au fond pour obtenir des dommages et intérêts.

Si l’auteur de la diffamation n’est pas connu, cela n’est pas vraiment gênant. Avec le constat, depuis la loi sur l’économie numérique de 2004, il est désormais possible d’interroger l’hébergeur du site pour obtenir l’adresse IP de l’auteur et ensuite d’interroger les fournisseurs d’accès pour connaitre l’identité de la personne.

A qui dois-je m’adresser en cas de diffamation sur internet ou sur les réseaux sociaux ?

Le premier réflexe étant de constituer la preuve, il convient de s’adresser à un Huissier de Justice spécialisé en la matière. En effet, les constats sur Facebook, Twitter, Instragram, Linkedin ou autre répondent chacun à des problématiques techniques spécifiques et il est fondamental d’avoir un constat rédigé dans les règles de l’art. De plus l’Huissier de justice spécialisé vous orientera à travers son devoir de conseil.

Quels sont les délais pour agir ?

La prescription désigne la durée au-delà de laquelle une action en justice n’est plus recevable. Elle est définie par l’article 2219 du code civil « La prescription extinctive est un mode d’extinction d’un droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps ».
Par principe et en vertu de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881, le délai de prescrit est de trois mois à compter du jour où ils ont été commis ou du dernier acte de poursuite ou d’instruction.
Le délai prévu par le texte est court, surtout dans l’hypothèse d’un dépôt de plainte, car le procureur de la république doit agir avant l’expiration du délai de prescription en citant l’auteur ou en ouvrant une enquête.
A défaut, la plainte est classée sans suite, même si déposé dans les délais. C’est pour cette raison que je n’oriente jamais mes clients sur le classique dépôt de plainte…

Il est également possible de changer de fondement et d’aller sur le terrain « du trouble illicite ». Je ne vais pas rentrer dans les détails juridiques mais il faut retenir que le délai de prescription change et devient alors plus avantageux.

La jurisprudence admet que les victimes de diffamation puissent saisir le juge des référés en vue d’une condamnation pour trouble manifestement illicite. A titre d’exemple, c’était notamment le cas dans une ordonnance de référé du 26 février 2016 rendu par le président du Tribunal de Grande Instance de Paris. En réalité le trouble manifestement illicite est constitué par la violation d’une règle de droit proche de la voie de fait. Dans une telle hypothèse, le délai de 3 mois est écarté au profit de la prescription quinquennale.

Que puis-je espérer dans le cadre d’une procédure pour diffamation ?

La première chose sera bien évidemment de faire retirer les propos et les publications objet de la diffamation. Le juge pourra d’ailleurs assortir sa décision d’une astreinte par jour de retard si les commentaires ou les articles diffamants ne sont pas retirés immédiatement.
Il conviendra ensuite d’obtenir le remboursement des frais de procédure engagés et éventuellement des dommages et intérêts.
A ce sujet, il faut préciser concernant l’évaluation du préjudice que le régime applicable à la diffamation sur internet diffère de celle sur presse écrite grâce à la jurisprudence de l’union européenne. En effet la cour de justice de l’union européenne dans un arrêt du 25 octobre 2011 juge que « la mise en ligne de contenus diffamatoires sur Internet se distingue de la diffusion territorialité d’un imprimé, du fait de leur consultation instantanée par un nombre indéfini d’internautes dans le monde. Ainsi le préjudice d’atteinte aux droit de la personnalité est plus grave et la localisation des lieux de la matérialisation du dommage résultant de ces atteintes rendue plus difficile ».